(wherever life takes you), nadley.

# 06/09/21, 01:26 pm

Les rues sont bondées. Tu tentes de te frayer un chemin comme tu le peux à travers la foule, cherchant des endroits un peu plus discrets, un peu plus d'oxygène à mettre dans tes poumons. Tu avais vu Tivan dans tous ses états, au cours des années - désertée dans les moments plus secs, vivante lors des belles températures. Mais rien ne se comparait jamais à la saison sociale. C'était le moment le plus occupé pour tout le monde, toi y compris. Et même si une partie de toi abhorrait devoir ainsi côtoyer la noblesse de ce monde, n'entendant parler que d'eux pendant des semaines, une autre aimait l'action que ça emmenait, et les ragots avec. Il y avait un chaos propre à la saison sociale, et c'était aussi le moment où il y avait le plus de travail, même pour une simple Ombre comme toi. Et te voilà avec des tâches à n'en plus finir, allant chercher tel textile, laissant glisser tes oreilles là, et terminant tes journées avec les pieds enflés et le sommeil facile. Avec un peu de chance, tu économiserais assez cette fois pour pouvoir te munir de nouvelles bottes - un souhait qui te faisait serrer des dents, quand tu observais telle ou telle princesse se demandait quelle paire de chaussures elle porterait cette journée là, entre ses douzaines de choix. Injuste, c'était le mot qui voulait siffler entre tes dents, mais tu le retenais.

Tu avais bien appris à te taire.

Tu déambules encore un peu, avant de prendre une grande goulée d'air frais, arrivant dans des rues moins fréquentées. Cette partie de Tivan, moins jolie, moins attrayante pour les yeux nobles, c'était ton royaume - ces rues dans lesquelles tu avais grandi et tout appris. Ton estomac se serre légèrement - tu n'as pas mangé depuis la veille, et voilà qu'on passe à côté de toi avec un chariot rempli à craquer de fruits frais pour un banquet quelconque. Tes yeux glissent sur les surfaces alléchantes des pommes, brillant au soleil, et tu n'hésites pas vraiment. Manipulant rapidement les ombres pour dissimuler ta main aux regards curieux, alors que tu attrapes un fruit. Tu tournes les talons en t'enfuyant, recherchant l'ombre offerte par les bâtiments pour t'y dissimuler, quand tu entends un hey que tu reconnais trop bien. Tu n'hésites pas non plus à te mettre à courir. Tu doutes qu'on ne viendra pas à ta poursuite pour une simple pomme, et personne n'a eu le temps de te reconnaître. Mais ça fait un bien fou de laisser tes jambes se délier par une véritable course, et tu te surprends à sourire, sentant la brise contre tes joues.

Sauf que voilà que tu n'avais pas prévu qu'un duo tourne le coin juste là, et en essayant de les éviter dans ta course, tu trébuches. Rien pour te retenir, et tu ne veux pas davantage attirer l'attention sur toi - alors ton corps s'effondre contre le sol. La violence du choc te coupe le souffle, t'érafle les paumes de main et tu te lacères la joue contre les cailloux - soupirant longuement, surtout, à ton épaule qui semble avoir encaissé le pire du choc. Tu restes là quelques longues secondes avant de te relever difficilement, poussiéreuse, tes yeux tombant presque trop naturellement dans le regard d'un type qui se tient pas bien loin de toi. Son visage est contorsionné par la douleur - et tu as l'impression de le connaître. Tu ne sais pas le moindrement qui il est, et pourtant oui. Et tu te retrouves à le dévisager, douleur cinglante sur ta joue, tes paumes et ton épaule. Who are you, stranger ?
Why do I feel like I've known you my whole life ?

# 06/09/21, 01:26 pm

T'as mal dormi. Les rêves agités, l'horreur infligée à ce visage que tu n'arrivais pas à discerner. Tu t'étais réveillé en sursaut, un cri au bord des lèvres, les muscles tendus à s'en déchirer. Ça t'avait pris quelques longues minutes pour te calmer, mais tu ne t'étais pas rendormi. De plus en plus irrité, à mesure que les jours passaient. Les âmes qui te connaissaient trop peu n'osaient plus te parler. La peur aux tripes, à mesure que ton équilibre continuait de glisser. L'instabilité de plus en plus poignante — dans ton élément, dans la manière dont tu le maîtrisais, et jusque dans ta personnalité.

T'es pas à ton mieux. Les cernes creusés jusqu'au milieu des joues, les épaules voûtées. Tu en parais quelques centimètres de moins, mais tu dépasses toujours de la marée de passants. Ils t'étouffent, et tu as besoin de t'en éloigner. Tu ramasses l'argent que le type te tend avec des doigts tremblants. Lui jettes un regard noir, avertissement que tu n'auras pas besoin de répéter. Puis tu t'extirpes du marché et de sa foule, parcours quelques mètres avant que l'air ne devienne plus respirable. Un soupir. Tu te cales contre le mur le plus proche, lèves les yeux vers le soleil qui cogne sur la rue entière. Quelques nuages le contournent, sans oser le cacher. Tu fermes les paupières. Le laisses t'emporter. Un léger vertige de fatigue, mais t'es bien, à part ça.

Jusqu'à ce qu'un fracas soudain, non loin, coïncide avec une douleur vive dans ton corps et ne te fasse rouvrir les paupières. Tu portes ta main à ton épaule, par réflexe. Ta joue te tire aussi, et tu grimaces. What the– ? Ça te pique dans le creux des mains, mais tu ne leur prêtes pas attention. L'oeil attiré par la gamine qui tente de se relever, non loin. À peu près ton âge. Les cheveux aussi noirs que les tiens, tombés en rideau autour de son visage sur lequel un peu de sang coule. Elle s'est pas manquée.

Elle n'est qu'à quelques mètres de toi, et tu les avales en trois pas. Elle s'est relevée pendant ce temps-là. Tu n'oses pas davantage t'approcher, mais fronces les sourcils. La douleur encore vive. Tu essaies de ne pas y penser, plus inquiet pour elle. Curieux, aussi. Étrangement attiré par les yeux noirs qui te toisent sauvagement. Do I know you ?

Tu ramasses la pomme, qui a arrêté son chemin à quelques centimètres de ta botte. Tu gardes ta main droite dans ta poche, tends le fruit à la fille de la gauche, en signe de paix. « Are you ok ? »Tu ne l'as pas vue tomber, mais on dirait que tu sais. Tu pointes ta joue pour lui faire comprendre qu'elle saigne. La voix calme et un peu hasardeuse. Tu ne la toucheras pas. Tu voudrais, sans trop savoir pourquoi, mais tu te contentes de lui demander : « Does it hurt ? » Assez loin d'elle pour qu'elle puisse partir en courant si elle le voulait. Elle n'avait qu'à récupérer sa pomme, et plus rien ne la retiendrait. Bien qu'une part de toi l'espérait.

Have we met before ?
Have we ?

'Cause I kinda feel like this was meant to be.

# 06/09/21, 01:27 pm

Tu as de la poussière dans les yeux et dans la gorge, le corps douloureux, mais ton orgueil est intact - pas du genre à t'embarrasser d'une quelconque gêne, même si tu ne t'attardes pas vraiment au sol. Pas envie que quiconque ait dans l'idée de venir t'aider à te relever, tu n'as besoin de personne, après tout, et tu es prête à passer à autre chose, sauf que deux détails t'empêchent de simplement continuer ta route. Premièrement, ta pomme n'est plus entre tes doigts, et ton estomac est toujours aussi vide ; et il y a ce type, tout près de toi, qui t'observe presque aussi intensément que tu le fais toi-même. Il te dévisage, et tu fais de même, sans trop savoir pourquoi - et tu le toises d'une manière méfiante alors qu'il te tend ta pomme tant désirée. « Are you ok ? » Tu ne sais pas si tu devrais, mais tu tends tout de même la main pour attraper la pomme. Il se tient à une distance respectable, et bien que tu ai envie de détaler pour continuer ta route, quelque chose t'en empêche. Son regard, peut-être. Sa manière de se tenir là. « Yes. » Que tu lui assures, d'une voix tout de même prudente. Tant que tu ne sauras pas ses intentions, tu préfères ne pas t'avancer. « Does it hurt ? » Tu ne vois pas pourquoi il te demande, puis il pointe sa propre joue, et tu réalises alors que tu saignes un peu. Tes doigts viennent essuyer la coupure un peu, sans grand succès - voilà qui ne sera pas très chic à présenter devant tes employeurs. Tu secoues la tête, cependant. « Not really. » Tu as connu bien pire, après tout.

Tu as un drôle de goût dans la bouche - la poussière, probablement. Tu roules ta langue contre ton palais, et tu grinces des dents alors que tu bouges un peu ton épaule. Celle-là, elle est douloureuse, cependant. C'est pas le moment de te blesser, et tu le sais. Alors tu relèves le menton, prête à prétendre autrement, sauf que tu vois quelque chose se dessiner sur le visage de l'inconnu - un tiraillement, dans ses traits, comme s'il imitait ton inconfort, comme s'il avait la même blessure. Tu plisses des yeux. « Do I know you ? » Que tu finis par demander, trop brusquement sans doute, mais tu as besoin de savoir. Cette impression que tu as de savoir qui il est, sans le connaître, ce grattement dans la gorge qu'il t'es familier. Tu n'aimes pas ne pas comprendre - alors autant demander. « Have you been following me ? » Tu ajoutes avec une légère hostilité, prête à te défendre contre n'importe quelle menace, à disparaître dans les ombres sans en demander davantage - mais quelque chose te souffle qu'il ne te veut rien de mal. Bien au contraire, en fait.

# 06/09/21, 01:27 pm

Elle attrape la pomme comme une sauvage, mais ne s'enfuit pas. Tu retires ta main rapidement, presque soucieux de ne pas la provoquer davantage. T'es intrigué, tiraillé par l'envie de la voir rester, et tu n'as aucune intention de précipiter son départ si tu peux l'éviter. Pourquoi, t'en sais rien, mais tu t'y accroches sans plus y penser. « Yes. » La prudence est de mise, dans sa voix, et tu te permets de lui poser la question suivante sans trop t'étaler. Sans davantage t'approcher. Elle ne semble pas avoir remarqué le sang qui coule sur sa joue — presque surprise lorsque ses doigts le trouvent et qu'elle vient l'essuyer. Does it hurt ? « Not really. » qu'elle te répond. Mais ne s'en va toujours pas. À te regarder avec autant de méfiance que tu pouvais en dégager. Who are you ?

Une douleur te fend l'épaule de nouveau l'épaule, inattendue, et tu grimaces sans pouvoir l'empêcher. Y portes une main pour la rouler — mais ton muscle semble bien fonctionner. T'essaies de ne pas faire de liens avec la gamine qui se tient devant toi, ses blessures, l'épaule qu'elle a roulée, une fraction de seconde avant que tu ne sentes la douleur de traverser. « Do I know you ? » T'avais la même question aux lèvres. Si tu t'efforces de ne pas sauter trop rapidement aux conclusions, les hypothèses se forment tout de même au fond de ton esprit, que tu le veuilles ou non. T'as envie de dire oui, t'as l'impression que oui. Et pourtant. « I don't think so. » que tu lâches un peu sèchement. Elle plisse les yeux, et tu le lui rends légèrement. Soudainement hésitant, remonté par la possibilité qui s'offrait et que tu commençais seulement à réaliser. What if... ?

« Have you been following me ? » Sa question te ramène à la réalité, et à l'absurdité de la situation. À ne pas savoir pourquoi tu te tiens là, pourquoi tu continues de lui parler alors qu'elle n'est de toute évidence pas blessée. Que tu pourrais continuer ta route sans te retourner. « What ? Of course not. Why would I ? » Tu t'offusques, mais tu sens la justesse de sa question. Le déjà-vu à fleur de mémoire, à voir ses cheveux noirs ainsi danser au vent. Tu l'as peut-être déjà croisée.Ça ne voulait rien dire.
N'est-ce pas ?

« What's wrong with your shoulder ? » que tu risques. Le tiraillement encore présent par vagues, et chez elle aussi, tu le soupçonnais. Tout était clair, mais tu refusais de sauter trop vite le pas. Sentant qu'elle te filerait entre les doigts, si tu ne prenais pas le temps de l'approcher. Bestiole à apprivoiser. Ton propre esprit ne pouvait croire à l'explication qui se formait. Temps d'adaptation. Temps d'acceptation.

« ... What's your name ? » que tu ajoutes après un temps. On dirait que t'as envie de savoir. Que c'est plus fort que toi. Que tu voudrais la replacer, pour comprendre cette curiosité inexpliquée. Relier les points que ton esprit peinait pour le moment à accorder. Maybe we just saw each other before.
Maybe it's nothing.

It's probably nothing.
But why do I feel like I know you ?

Why do I feel like I've always been looking for you ?

# 06/09/21, 01:27 pm

« I don't think so. » Il a l'air tout aussi déboussolé que toi - sinon plus. Toi, ta confusion, tu ne sais pas trop comment la gérer, et tu as tendance à trop rapidement sombrer dans la paranoïa. Et c'est exactement ce qui se passe. Les options te semblent nombreuses, aucune d'elles rassurantes, et tu n'aimes pas tous ces indices qui te dansent devant les yeux, agitant la main pour tirer une conclusion que tu ne veux pas faire. Tu es catégorique, tu es décidée à ignorer tout ça, mais ta curiosité prend le dessus et tu te dis que ça serait plus facile de simplement avoir affaire à un type trop curieux qu'une quelconque autre option. Le coeur qui se déballe toujours dans ta poitrine, incapable de ralentir, l'adrénaline qui cours toujours dans tes veines de la légère course que tu as dû faire. Tu as l'impression d'être tombée nez à nez avec ton destin - et tu rejettes immédiatement l'idée. Pas la bonne journée pour ça.
Mais quand est-ce que ça le sera ?

Alors tu le confrontes, cet inconnu, la méfiance au bout de la langue et dans l'idée de détaler à la première occasion, et de t'assurer qu'il n'allait pas pouvoir te retrouver. Mais il est semble sincèrement dérouté quand tu lui poses la question au bout de tes lèvres. « What ? Of course not. Why would I ? » C'est peut-être simplement un bon acteur. Un talentueux menteur. Tu sais que tu dois couvrir tes arrières dans cette vie souvent trop cruelle envers les tiens - la confiance est loin de te venir facilement. « I dunno. » Que tu trouves à répondre, haussant les épaules et balayant l'air de tes mains. Tu n'avais pas à fournir de raisons - c'était lui qui continuait de te dévisager comme il le faisait. « What's wrong with your shoulder ? » Tu plisses des yeux et la réponse te vient comme si on t'avait piqué avec un couteau. « What ? Nothing ! » Tu fais un pas pour reculer, mais par instinct ta main s'est relevée vers ton épaule douloureuse, qui continue de te tirer. Tu te trahis et tu le sais, alors tu lèves les yeux au ciel. « I guess I hurt it falling. It's fine. » Tu ne sais pas pourquoi tu es autant sur la défensive - d'habitude tu es plutôt détendue autour des étrangers, mais quelque chose chez lui vient te chercher dans le creux de l'estomac.

« ... What's your name ? » À ton tour de le dévisager, et on dirait que tu sais que ça ne sert à rien de t'attarder davantage. Peu importe qui il est, ça ne changera rien à ta vie - tu as une pomme à manger, une routine à laquelle retourner. « None of your business. » Que tu lui balances avant de faire demi-tour sur tes talons, le coeur qui continue de battre comme si, au profond de toi, tu avais compris quelque chose. « Have a good day ! » Tu sens nécessaire d'ajouter, tes bottes gravissant le sol, faisant voler la poussière autour de toi, et tu es prête à disparaître dans les ombres. Tu ne veux surtout pas y penser. Tu ne veux pas t'attarder sur cette impression qui reste sur ton coeur, telle une empreinte, que ce type n'était pas n'importe qui, et que tu n'as pas terminé d'entendre parler de lui.
Mais tu n'as besoin de personne.
Tu ne veux de personne.

So just keep going, Adley.
Just keep going.

Sauf que tu sens l'air bouger derrière toi. Tu vois les ombres se dessiner contre les bâtiments, contre la poussière. Et ces ombres, tu les connais bien. Alors tu sais que tu n'es pas seule, alors tu fais volte-face sans prévenir et tu lèves ton index pour pointer son visage. « Now you're following me. What do you want ? » Tu croises les bras, le regard rempli de tempêtes.

# 06/09/21, 01:27 pm

Elle a l'air sur le point de déguerpir, et tu le vois. Recules d'un demi-pas, par peur de l'encourager. Tu sais que tes questions n'aident pas, mais tu es incapable de les retenir. Ça flinguera tes chances si tu ne sais pas garder ta langue — mais quelles chances, au juste ? Tu la regardes sans pouvoir te détourner. Les yeux sauvages, les cheveux emmêlés par la chute. Une mèche blanchie par la poussière. Le corps en posture défensive, prêt à s'actionner pour filer.
Un mot de trop, et tu la perdras.
Mais tu ne peux pas t'en empêcher.

« What ? Nothing ! » Mais tu sais qu'elle a mal. Tu le vois sur ses traits, et la main qu'elle porte à son épaule ne fait que le souligner. « I guess I hurt it falling. It's fine. » But it's not. Why are you lying ? Parce qu'elle ne te connaît pas. Parce que tu n'es qu'un visage dans la foule, et qu'à part pour lui rendre sa pomme tu n'as rien fait qui pourrait l'inciter à te faire confiance. Tu comprends ça. À sa place, tu serais déjà parti. Mais quelque chose te tient là.

Tu vas trop loin. Tu le vois dans ses yeux, quand tu lui demandes son prénom. Tu ne t'attends pas à ce qu'elle te réponde. La connexion qui s'était tissée en un regard, en une proximité, s'est évaporée à mesure que ta curiosité grandissait, et que tu te trouvais incapable de la garder sous clé. Il avait fallu que t'essaies. « None of your business. » Et aussi simplement que ça, elle tourne les talons. Tu serres les dents, te maudis intérieurement, l'entends balancer, « Have a good day ! », et aussitôt, elle a filé.

Tu restes planté là, un bref instant. Regardant autour de toi, pour constater que personne n'a eu l'air de relever votre conversation. Les paires d'yeux sont occupées ailleurs, et ça te décide. T'as rien à perdre, et elle est tout ce à quoi tu peux penser. Ça, ton épaule qui te tiraille, et le besoin inexpliqué d'être à ses côtés.

Tu t'enfonces dans la ruelle à sa suite.
What the hell are you doing ?

Tu sais qu'elle te remarquera. Que la discrétion n'est pas de mise, et qu'elle n'aura pas d'autre choix d'accélérer ou de te confronter.

Et si tu ne la revoyais jamais ?
Et si c'était elle, et que tu la perdais ?

Tu balaies le tout de tes pensées. Immense dans les ombres qui se dessinent autour de vous. Tu réalises qu'elle pourrait être une prodige, pour tout ce que tu en sais. Les ombres ne sont peut-être pas siennes, et tu passerais pour le pire des idiots si c'était ça. Le plus flippant, aussi. Tu préfères ne pas y penser. Ne pas t'y arrêter.
Continuer à la filer.

Elle ne met pas longtemps à stopper sa course. Fait volte-face avec une énergie inouïe, et tu en sursautes presque. Te figes, mains dans les poches tandis qu'elle pointe vers toi un doigt accusateur. Yeah. You're a creep, Nader. « Now you're following me. What do you want ? » Tu serres les dents. You know why, don't you ?
You feel it too.

« Ever since you fell, my shoulder hurt. » que tu te contentes te planter. Le noir dans tes yeux affronte les tempêtes des siennes, et tu ne bouges pas. Mains dans les poches, l'air fermé. « Who are you ? » que tu lui balances sans retenue. Méfiant, toi aussi. Tiraillé par l'envie d'avoir des réponses à tes questions, à ta vie, autant que par celle de tourner les talons et de ne pas y revenir. T'as pas besoin d'âme soeur.
Pas besoin.

Mais l'air est devenu instable, autour de toi.

Et peut-être qu'à tout bien y penser, ça te ferait du bien.

Peut-être qu'en fait, t'en as besoin.

# 06/09/21, 01:27 pm

Tu es prête à continuer ta vie sans te retourner. À oublier cette rencontre bien étrange, à ne plus avoir à y penser. Tu as déjà suffisamment à te préoccuper, et tu n'as pas besoin de te rajouter ça. Ta pomme entre les mains, tu es prête à croquer dedans pour en savourer le goût quand tu sais qu'il t'a suivi. Une partie de toi ne peut s'empêcher d'être effrayée ; même si une voix dans ta tête te souffle que tu n'as rien à craindre. Bien au contraire. Ta peur n'est que celle de la gamine ayant grandi dans les rues, celle qu'on a voulu écraser, celle qu'on pouvait malmener sans conséquences. Plus maintenant. S'il y avait bien une chose que tu maitrisais, c'était comment disparaître dans les ombres.

Mais celui-là, il t'intrigue. Alors au lieu de continuer ta route et disparaître, tu tournes sur tes talons et tu le confrontes. Regard noir, bras croisés. Il ne semble pas surpris, et pourtant pas à l'aise avec sa présence si près de toi. Tu ne comprends pas. Mais tu sens quelque chose, au fond de toi. Et lui aussi, à sa manière de te regarder. Ce n'est pas de la méchanceté, pas de l'avidité. Juste de la curiosité. « Ever since you fell, my shoulder hurts. » Tu serres les dents, parce qu'il te confirme ce à quoi tu ne voulais pas le moindrement faire face. L'instinct que tu avais eu en le regardant, et ce sentiment dans le creux de ta poitrine. Tu as envie de lui répondre, so what ?Mais tu connais déjà la réponse. So everything.

« Who are you ? » Tu serres encore plus les dents. « I'm no one. » Tu le siffles comme une menace, mais ça sort d'une voix trop tremblante pour que ce soit convaincant, tu le sais. « It's probably just a coincidence. » Tu hausses les épaules, ignorant la pointe de douleur, même si tu sais que c'est absolument n'importe quoi. Pas des coincidences comme ça. Pas dans votre monde. « You... I... » Tu hésites, tu trébuches. Mais tu secoues la tête. « I can't deal with this right now. » Tu as peur. Tu es terrifiée de la vérité, de qui il est, de comment ça pourrait changer ta vie. Tu n'es pas prête à ça. Alors tu tournes à nouveau les talons, rabattant les ombres contre toi, et tu files. La gorge serrée, le coeur qui bats fort dans ta poitrine. Run, run,
run away.

# 06/09/21, 01:28 pm

« I'm no one. » qu'elle ne tarde pas à te siffler. L'insistance aux lèvres, l'envie de te prouver que vous n'aviez rien pour vous lier. Mais tu n'y crois pas. Tu vois dans ses yeux qu'elle est aussi effrayée que toi. Par la situation, abrupte et inespérée. Par ce déjà-vu qui vous a saisis au moment même où vos yeux se sont croisés. À te demander, ne l'as-tu pas déjà vue ? Vagues souvenirs d'épaules qui se frottent, d'enfants qui se toisent avant de s'évader. À chaque seconde qui passe, tu es un peu plus certain de l'avoir déjà croisée. Peut-être est-ce la seule raison qui te fait t'acharner.

« It's probably just a coincidence. » Elle fait écho à tes pensées. Trop aisément, trop spontanément. Et une part de toi voudrait aller dans son sens. Balayer l'occurrence, pour retourner dans l'impression de sécurité que la vie en solitaire t'avait si longtemps procurée. Personne de qui dépendre,
Personne à protéger.
C'était ça, la liberté.

Tu lui réponds pourtant trop rapidement. Réflexe cinglant, alors que le noir se creuse dans tes prunelles, et te fait serrer les dents. « What if it's not ? » You know.
You know it's not.
« You... I... » Elle en perd ses mots et, au fond de tes poches, tes poings se crispent. « I can't deal with this right now. » Tu vois la peur dans ses yeux. Pour une seconde, tu envisages de la laisser filer. De baisser les bras, alors qu'elle tourne les talons et force les ombres à l'envelopper. Mais tes tripes grondent, ton instinct bouillonne, et t'as déjà compris quel genre de gamine c'était. La pomme à laquelle elle s'accrochait comme sa vie. Le pas léger. Les courses effrénées. Tu sais ce que c'est. Combien de temps avant qu'elle ne se fasse attraper ?
Avant qu'on ne lui coupe la main pour avoir volé ?
Qu'elle s'attire des ennuis auprès du mauvais bougre, et en paie le plein prix ?

Est-ce que tu prendrais le risque de mourir à tout instant, rien que pour la liberté qui t'avait dernièrement étouffé ?

Ton choix est trop vite fait et, avant que tu ne le réalises, tes mains sont sorties de tes poches. « Wait ! » Pour la première fois depuis longtemps, tu sens ton élément coopérer. Les mouvements souples des doigts sont instinctifs, et au coeur des ombres l'air change. Bouge, se fige, stoppe sa course en douceur. Tu ne la retiens pas longtemps. Juste assez pour te rapprocher, et pour lui faire comprendre que tu n'as aucune intention de la blesser. « Wait. » Tu laisses retomber tes mains près de toi.
You couldn't help it, could you ?
Let's just hope she can forgive you.

« I can't let you go. » que tu finis par lâcher. Ton propre égoïsme empiétant sur le sien, alors que l'espoir fou de retrouver la stabilité de l'air, le sommeil léger, t'envahit. « This isn't just about you. » Ta voix claque. Intransigeante, et pourtant prudente. « Not anymore. » And you know it.T'avais pas envie de t'enchaîner à cette tignasse folle et ces yeux mouvants — mais tu ne supportais plus la solitude et la souffrance de ne pas l'avoir à tes côtés. C'était un mal pour un autre.

Et peut-être que sur un malentendu, elle finirait par l'accepter.
Peut-être qu'au bout du compte, vous réussiriez à vous allier.

# 06/09/21, 01:28 pm

« What if it's not ? » Tu le détestes de dire ça. De se tenir là, en te regardant dans les yeux, à te faire comprendre une chose à laquelle tu ne veux pas faire ça. Tu le détestes et pourtant pas le moindrement - une part de toi qui se lie à lui sans que tu ne puisses l'empêcher. Ça te fait serrer les poings, grincer des dents, non, tu ne veux pas de ça, tu es terrifiée de ce qui arriverait si tu oserais détendre tes épaules et vraiment faire face à ces pensées soufflées dans ton oreille par ton instinct. Tu ne veux pas lui parler, pas le regarder, pas comprendre ce qui est en train de se passer - qui il est, qui vous êtes. Ta destinée dans le creux de ta main ; mais non. Tu refuses.Talons tournés, la brise contre tes joues, et tu espères qu'il te laissera partir.

Pendant un bref instant, tu penses presque que c'est le cas - puis alors que tu entends sa voix derrière toi, te demandant d'attendre, tu sens ton corps percuter l'air. Un air solide, un air modifié. Ça te fait serrer la mâchoire. Prodige. Tu es bien tentée de lui donner un aperçu de tes pouvoirs à toi, mais il est à tes cotés en un instant, et il y a assez de douceur dans ses grands yeux pour te faire hésiter. Quelque chose t'accroche, entre ses longs cils et ses prunelles. « Wait. » Tu n'aimes pas qu'il se soit servi de son pouvoir contre toi - mais est-ce que tu n'aurais pas fait la même chose ? Est-ce que tu n'aurais pas contrôlé les ombres, une fraction de seconde plus tard, pour disparaître plus aisément ? Alors tu le regardes, vraiment, pour la première fois.

Masse de cheveux noirs, boucles parfois détendues, parfois serrées. Les vêtements typiquement Linjei, les bottes de cuir. Qui tu es, au juste, hein ? Quelque chose t'attire à lui. T'empêche de vraiment vouloir partir. Tu ne desserres pas les poings, cependant. « What ? » Que tu siffles comme une vipère, encore une fois. Il semble presque désolé de te le dire. « I can't let you go. »Tu veux lui répondre, why not, mais on dirait que tu sais déjà la réponse. « This isn't just about you. Not anymore. » Ça te mets hors de toi, et tu sens presque ton corps vibrer face à la virulente réaction émotionnelle que ses mots ont sur toi, parce que ça ressort toute la peur et colère contenues à l'intérieur de toi depuis trop longtemps. Mais tu le sais, il a raison. Des mois que tu faiblis, que les cauchemars te tordent l'esprit, que tu tombes dans les pommes sans avertissement. Ça ne pouvait plus durer ; et voilà que, peut-être, tu avais la solution devant toi. Mais s'il était ce que tu croyais qu'il était, ça signifiait aussi être relié à ton Prodige à jamais. Ta liberté, disparue. Il l'a dit.
Il ne peut pas te laisser partir.

Vision cauchemardesque de toi avec les chaînes aux chevilles et aux poignets, oubliée dans une cage. Tu secoues la tête. « I... » Tu t'arrêtes. Il y a une manière simple de vérifier. Sans attendre, bougeant aussi rapidement que tu le peux, tu saisis son poignet. À la douleur vive que tu avais ressenti, ce jour-là, il doit il y avoir une trace. Tu relèves sa main dans la pénombre de la ruelle, ramenant au bon endroit un rayon de soleil traînant contre la brique, pour les éclairer. Ton coeur s'arrête. Tu dévisages les doigts coupés comme s'ils étaient les tiens, te rappelant des trop nombreuses douleurs fantômes que tu as toi-même. Ton souffle se coupe dans ta gorge. « Shit. »Il y avait la marque, qui pourrait te le confirmer. Mais on dirait que c'est suffisant. Tu le sais, au fond de toi. Tu lâches son poignet, ton regard toujours méfiant, toujours hostile. « They still hurt. » Que tu lâches. « Don't they ? » Tu plantes tes yeux dans les siens. Confuse. Égarée. En colère. Méfiante.

« I'm Adley. » Les mots sont déterminés. Tu ne sais pas ce que tu vas faire - mais d'ici là, autant en apprendre le plus que tu peux, sur celui-là. « What's your name ? » Un peu plus loin, le bruit de la foule. Le bruit de la ville, qui vibre avec la nouvelle saison. Un monde que tu as presque oublié, alors que ton regard est tombé dans celui de ta destinée.
Une destinée que tu fuiras au premier souci,
et sans un autre regard.

# 06/09/21, 01:28 pm

L'obligation soudaine ne te plait pas. Contrainte que tu avais toujours apprécié pouvoir éviter. La solitude était devenu un quotidien auquel tu t'étais habitué. Ne pas te soucier d'une autre âme que la tienne. Loyauté à ta soeur et au gang, sans aucune allégeance forcée par un lien que tu n'avais pas choisi. T'étais libre. Jusqu'à aujourd'hui, à tout le moins.

Tu aurais pu la laisser filer. Tu aurais pu lui laisser sa liberté, réclamer la tienne par là même. Mais t'es fatigué des nuits où tu te réveilles avec les tortures au fond de l'esprit. Fatigué du brouillard de ce visage auquel tu es lié bien contre ton gré. Fatigué de savoir qu'à tout moment, le destin funeste d'un inconnu pourrait t'emmener. Éreinté, de sentir ton élément t'échapper. C'est un choix. Sacrifice d'un équilibre qui perdait de sa vigueur, pour une stabilité plus encombrante et plus difficile à gérer. Mais vous étiez nés pour être deux, et ça ne servait plus à rien de résister.
À la voir, là,
À l'empêcher de s'enfuir à nouveau,
À employer de faibles mots pour la convaincre de rester,
Tu t'es laissé allé.
Aux bras de ta destinée.

« I... » On dirait qu'elle n'a plus rien à répondre. Qu'elle sait, elle aussi. Et brusquement, elle fuse vers toi. Tu as le réflexe de faire un pas vers l'arrière, mais pas d'ôter ta main de la trajectoire de ses doigts. Elle saisit ton poignet, et tu te braques lorsqu'elle le lève au grand jour. Le rayon de soleil qu'elle amène sur tes doigts est agréable, mais tu ne te détends pas. Les dents serrées, l'envie de te dégager et de la bousculer, lui apprendre les bonnes manières, mais tu ne bouges pas. Tu sais ce qu'elle cherche.
Ce qu'elle trouve, d'un coup d'oeil.
« Shit. »
Les phalanges manquantes, au bout de ta main. Amputation sèche qu'elle avait dû sentir, à défaut de réellement vivre. Did it hurt as much for you as it did for me ?

Tu la laisses les observer un instant — mais dès qu'elle ouvre la bouche pour reprendre la parole, tu dégages ton poignet d'un geste sec. Don't push me. « They still hurt. Don't they ? » T'as la bile dans la gorge, l'amertume que tu ne t'expliques pas — mais elle sait tout de toi. Tout et rien à la fois. « They do. Sometimes. » Tu affrontes son regard, sans ciller. Incapable de plus lutter contre l'évidence qui vous bouffait. Et elle aussi l'a accepté. Qu'en un regard échangé, vos destins ont été scellés. Que la vie vous avait peut-être réellement mis sur les pas l'un de l'autre, par le passé. Tu te souviens, Nader.
Tu te souviens d'elle. À ainsi l'observer se mouvoir, à te noyer dans ses yeux noirs, tu te rappelles. La voix claquante du marchand. Sa main rugueuse sur le poignet de la gamine. Ta distraction instinctive, pour l'aider à s'enfuir. Vous n'aviez jamais pris le temps de vous retrouver. Pas jusqu'ici, en tout cas.

« I'm Adley. » qu'elle te dit. Adley. Ça ne sonne peut-être pas aussi familier que ça le devrait. Une part de vous reste après tout des étrangers. « What's your name ? » C'est à ton tour de laisser le silence lui répondre. Pas un affront, plus qu'un moment pour t'imprégner de la situation.
Adley. La fin de la solitude. Le début de tes ennuis.
Adley. La fin de ta vie.
Le début d'une autre, aussi.

« I remember you. » que tu articules au vent. La voix stable, sans la moindre marque d'hésitation. Tu es certain, désormais. « You were stealing this merchant's best coat. He caught you. » Tu ne la lâches plus des yeux. « I stole his purse so he would run after me and let you go. » Et il a bien failli t'avoir aussi.
Tu t'es caché où il fallait.
Le soir même, tu t'enrôlais.
A-t-elle toujours fait partie de ta destinée ?

« Yeah. » Tu murmures pour toi-même, cette fois. Certain de ton souvenir. Certain de ce visage plein, constellé, qui t'avait assez happé pour que tu veuilles l'aider. Yeah. I remember you. « I'm Nader. » lâches-tu, d'une voix un peu plus assurée. « So... » T'as pas l'intention de t'asseoir et de lui raconter ta vie. Pas l'intention d'entrer dans une conversation qui ne te ressemblerait pas. Tu ne connais rien d'elle, après tout.
Rien du tout.

« Did you steal that apple too ? » Tu désignes brièvement le fruit qu'elle tient toujours entre ses doigts. Question sans jugement. Simple curiosité. À essayer de mieux la comprendre. De savoir d'où elle venait. Dans quoi tu avais mis les pieds.

Foutue destinée.

# 06/09/21, 01:28 pm

Tu sais que tu pourrais filer à nouveau, courir et ne pas te retourner. Tu sais que tu devrais sans doute le faire. Que peut-être, il n'aura pas le coeur de te poursuivre à nouveau, de continuer de bloquer ta route, sans relâche, jusqu'à ce que tu abdiques. Peut-être que lui aussi veut sa liberté, et réalisera que c'est mieux de te laisser aller. Mais tu sais que ce n'est pas vrai. S'il est ce qu'il est, tu as besoin de lui, et lui de toi. Ça te fait peur, ça te serre les tripes, et tu as envie de hurler. Vingt-cinq ans à courir, à redouter ce moment, et tu y étais finalement. Face à ta destinée, à l'inévitable. Ta vie, entre ses mains. Bonnes intentions ou pas, il a le pouvoir sur toi. Tu aimerais tellement pouvoir te répéter qu'il n'est pas ce que tu crois, mais les indices sont cruellement évidents. Son regard. Son aura. Ses doigts.
This pull, between you and him.
You feel it, Adley.
No need to deny it.

Il ne baisse pas les yeux, et retire son poignet. « They do. Sometimes. » Tu serres les dents encore plus fort. I know, que tu as envie de lui claquer. Tu la sens, la douleur. Poignante, éphémère - et à chaque fois tu t'attends à voir tes doigts couverts de sang. Douleur fantôme. Tu as peur de le regarder. De savoir qui il est. De lire ce qui se passe dans ses yeux, son histoire sur sa peau. Mais tu n'as pas le choix. Alors tu lui donnes ton nom. Tâtant le terrain, n'enlevant pas la possibilité de filer à la première occasion. Tu ne laisseras personne te mettre les chaînes aux pieds.

« I remember you. » Tu le dévisages, sourcils froncés, lèvres entrouvertes. What do you mean ? « You were stealing this merchant's best coat. He caught you. I stole his purse so he would run after me and let you go. » Tu sens un long frisson te parcourir l'échine, alors que le souvenir te revient comme une violente bourrasque. Tu vacilles légèrement, tes yeux s'ouvrant encore plus. Aucun mot ne s'échappe d'entre tes lèvres. You remember him, too. You didn't before. But now you do.

On dirait presque que ça le calme. Mais toi, ça ne fait que t'agiter davantage. Est-ce qu'il a toujours su ? Est-ce qu'il te surveille depuis ce temps-là ? « I'm Nader. » Tu déglutis, plus méfiante, et en même temps, plus calme que depuis que vos regards se sont croisés quelques minutes auparavant. « So... Did you steal that apple too ? » Tu baisses les yeux vers la main qu'il désigne, te rappelant soudainement de la présence du fruit entre tes doigts. Tu pinces légèrement des lèvres. « Yeah. » Ton coeur bats tellement vite que tu pourrais presque l'entendre aussi bien que le bruit du port, à quelques pas seulement. « I got some practice. I don't get caught anymore. » Tu le dis d'une voix prudente, malgré la légère malice. « Not as often, anyway. » Que tu rajoutes, presque juste à toi-même. Puis, tu te reprends. C'est un Prodige. Il n'hésitera pas. Tu ne peux pas non plus.
Garde ta liberté, Adley.
C'est tout ce que tu as.

Tu te redresses, allongeant ton dos - et malgré ça, il est bien plus grand que toi. « Well, it was nice to meet you. » Ça sonne complètement faux, mais tu ne veux pas faire d'effort. Tu as trop peur de ce qu'il pourrait faire - de ce que tout ça pourrait vouloir dire. « Gotta run, though. Places to be, y'know. » Tu hausses légèrement les épaules, balançant la pomme dans sa direction pour le distraire. Worth the small sacrifice. Tu dormiras le ventre creux, c'est tout. « See you around, Nader. » Tu tentes son nom contre ta langue, alors que tu tournes les talons sans demander ton reste. Les émotions sont trop fortes, trop puissantes. Tu sais que tu devrais rester. Qu'ensemble, vous serez plus forts. Mais tu as trop peur.
Juste une gamine qui se réfugie dans la noirceur, dans la solitude.
Tu cours, les ombres t'enveloppant trop rapidement.
Tu connais ces rues. Tu sais disparaître.

Même si à présent, tu sais que tout a changé.

# 06/09/21, 01:29 pm

Là où tu t'es ouvert, elle s'est renfermée. Les souvenirs t'en feraient sourire, à réaliser que tu l'avais déjà croisée. Mais elle n'avait pas l'air de le prendre aussi bien. Et tu le vois, dans ses yeux. La crainte que l'étau se referme autour d'elle. Que tu la mettes en cage, et que tu la prives de sa liberté. Tu devines à sa posture, à la flamme dans son regard, que c'est ce qu'elle a de plus précieux. « Yeah. » qu'elle te répond. Te jaugeant. Te mettant déjà dans le même panier de fruits pourris que tous les autres prodiges qu'elle avait dû croiser. Can you blame her ? « I got some practice. I don't get caught anymore. » Tu en sourirais, une fois de plus — si tu ne constatais pas qu'elle avait l'air de t’échapper. Au moins, elle ne nie pas. Tu ne passes pas pour un fou.
Juste pour un monstre.
« Not as often, anyway. »
Son monstre.

Tu la toises. Silencieux, incapable de la lâcher des yeux. Tu la vois s’allonger, prête à filer. Tu sais qu’elle va tenter une passe, mais tu n’es pas décidé à l’en empêcher. Pas cette fois. Tu as son nom, tu connais son visage. Tu sais qu’elle vole, et qu’elle vit dans le coin. C’est suffisant pour la retrouver. D’ici là, tu n’as aucune envie de la terroriser davantage.
D’ici là, t’as besoin de respirer.

« Well, it was nice to meet you. » But it wasn’t, was it ? Tu ne dis rien. Ne bouges pas. Tu ne veux pas lui donner l’impression que tu vas la retenir, la bloquer, la garder ici, à tes côtés. Tu ne veux pas être le monstre qu’elle a décidé de te baptiser. Pas alors qu’elle ne connaît rien de toi, et que tu as besoin d’elle pour exister. Et peut-être que tu la comprends, au fond de toi. Toi non plus, tu n’as jamais voulu ça.

« Gotta run, though. Places to be, y'know. » La pomme vole dans ta direction, et tu la rattrapes par réflexe. Laisses la distraction fonctionner, les derniers mots d’Adley sonner comme un glas que ni l’un ni l’autre vous ne pourriez éviter, désormais. « See you around, Nader. » Ton nom dans sa bouche ne te plaît pas — trop intime. Mais tu t’y feras. Plus le choix.

Tu la regardes disparaître dans les ombres.
Bien décidé à ne pas lui donner la chance de te fausser compagnie pour de bon, par simple ivresse de liberté.
Condamné à la retrouver.

D’ici là, how did she put it ?
Places to be.

See you around, Adley.

[size=15]( le soir-même )[/size]

Ça t’a bouffé. Toute la journée.

Tu as ramené le dû que tu étais parti chercher. Tout roulait, au casino — et tu avais promis à Genya de venir assurer la relève à partir de minuit. D’ici là, t’avais des questions à poser.

T’aurais dû la laisser respirer. Lui donner la nuit, le lendemain, pour accepter que tout venait de changer. Mais t’avais vu son regard farouche, vu son pas dansant. Légère et silencieuse, elle aurait pu quitter la ville dans la nuit. Te filer entre les doigts. Disparaître à jamais, et te laisser crever sur le bord de la chaussée. Et si tu n’avais pas la moindre intention de la brusquer, tu n’avais pas non plus pour projet de la laisser vous condamner.
Sorry about that, Adley.

La pomme roule entre tes doigts. Tu les gardes enfoncés dans ta poche, relevant le nez vers l’enseigne où, on te l’a assuré, Adley appréciait boire et se prélasser. Tu commencerais par là.
Retrouver sa trace n’avait pas été des plus aisés. Tu t’étais heurté à la méfiance de quelques ombres, que les mots n’avaient qu’à peine apaisés. On t’avait cependant donné ce que tu voulais, et tu avais payé les quelques pattes récalcitrantes qui restaient. L’oeil noir, la main sûre. Tu la retrouverais.

Et alors que tu entres, la chance te sourit enfin. Elle est là, tu le sens. Incapable de te l'expliquer. C'est donc ça que ça fait ?

Ton regard fait le tour du bar, et tu la vois enfin. Les cheveux noirs dégringolant sur son dos. Le dos courbé, la posture aussi farouche qu’à la minute où tu l’avais confrontée. Faut croire que c’est juste qui elle est. Tu t’approches simplement, le pas tranquille, l’aura dégagée de toute cette méfiance et ce choc qui t’avait animés un peu plus tôt dans la journée. C’est ton destin.
Y a plus qu’à l’affronter.

Tu sors la pomme de ta poche et la poses sur le comptoir, à côté du verre d’Adley. Ta main droite volontairement utilisée, les moignons de tes doigts trop en évidence pour qu’elle puisse les louper. Hi, Adley. Tu ne dis rien, pourtant, tires un tabouret pour t’y installer. « You forgot that. »que tu lui lâches simplement. À l’extérieur, le soleil a disparu. La nuit enveloppe le bar, ses gens. À moins de vouloir attirer trop d’attention sur vous, la meilleur option restait la conversation. Et tu espérais qu’Adley se prête au jeu. Ne serait-ce que pour votre sécurité, à tous les deux.

Give me a chance, would you ?
I ain't gonna hurt you.
And I don’t like this much more than you do.

Just let me prove it to you.

# 06/09/21, 01:29 pm

Il t'a laissé partir. Tu le sais. Ça aurait été facile de te bloquer le chemin à nouveau, de te rattraper, de te suivre. De t'empêcher de filer dans les ruelles de Tivan comme tu l'as fait, pour te garder à ses côtés, là où il pourrait te surveiller. Ta fuite est trop facile. Il t'a laissé partir. Tu ne sais pas vraiment quoi en penser. Sans doute qu'il te retrouvera plus tard ; sans doute qu'à présent, tu ne pourras plus lui échapper. Peut-être que ce n'est pas prudent, non plus, de passer ta vie à courir. Finir tes trop courtes années en perdant peu à peu tes pouvoirs, ta gorge asséchée, tes pensées brouillées par l'absence de celui qui serait à jamais ta moitié.

Tu t'arrêtes de courir plus d'un kilomètre plus loin, te laissant tomber sur un banc entre une veille femme et un jeune homme nerveux. Tu attrapes le couteau le plus proche de toi, le faisant tourner entre tes doigts, l'observant longuement, les pensées obnubilées par lui. Nader. Tu retournes le nom dans tes pensées, tu le chuchotes à personne sauf toi-même. Le soleil contre ta nuque, les bruits de la foule autour. Au moins, ça n'avait pas l'air d'être un noble. Pas un prince, pas un soldat non plus. Des vêtements presque aussi usés que les tiens, des bottes salies par la poussière et la boue, des mains devenues rugueuses par le travail. Pas si différent de toi ; et il n'avait pas été menaçant. Il ne t'avait pas regardé comme un insecte. Pas comme la plupart des Prodiges aimaient le faire. Non, il avait été différent. Peut-être as-tu vraiment de la chance. Tu n'oses pas lui faire confiance, mais tu ne peux nier la partie de toi qui est soulagée de savoir qui il est. On dirait que déjà, tu te sens un peu plus forte, un peu plus solide, un peu plus complète. Tu manges la pomme, tes pensées tournées vers Nader. Il te retrouvera sans doute. Il sait ton nom ; ça ne pourra pas être compliqué.

La nuit tombe, lentement. Ciel passant du pastel au profond, et les lumières s'allumant partout à Tivan. Toujours un peu de musique quelque part, trahissant la saison sociale qui animait les rues et les âmes. Quelque chose gronde, au loin. La ville est plus en vie que jamais. Quelque part, les nobles échangeaient ragots et négociations, sirotaient du champagne et des canapés. Toi, y'a un seul endroit où tu veux vraiment aller.

Tu t'installes au comptoir après que la nuit soit tombée, et rapidement tu as un verre entre les doigts. Pas beaucoup de pièces dans les poches, alors tu savoureras celui-là. Tes économies sont moindres, et il te tarde d'accomplir quelques boulots ici et là pour faire tes économies pour l'année qui s'annonce. D'ici là, tu passes ta soirée avec les yeux dans le vague, discutant un peu avec des visages connus, mais on te voit préoccupée. Une ligne sur le front, alors que tes yeux ne cessent de tomber sur quelque chose qu'on ne peut pas voir. Tu n'as pas réussi à te le sortir de la tête. Nader. Ton âme soeur. Tu l'as trouvé. Tu l'as trouvé. Partagée entre le soulagement et l'amertume, tu ne sais où te poser. Une énième gorgée, alors que ton verre descend bien trop vite à ton goût. Tes cheveux en cascades sur tes épaules, tes épaules dénudées pour la saison chaude. Tu claques légèrement ta langue et tu relèves la tête, soudainement.

Tu n'es plus seule ici.

Tu le sens arriver avant qu'il ne s'assoit à tes côtés. Une vibration dans le creux du coeur, comme un appel dans la brume. C'est pourtant une pomme qui apparaît dans ton champ de vision en premier. Ton estomac gronde légèrement, mais toi, tu ne fais qu'observer les doigts coupés qui la dépose devant toi. « You forgot that. » Tu serres les dents, relevant des yeux remplis d'énergie sur lui. « Or maybe I just wanted to see if you would've eaten it before finding me again. » Les rues sont un labyrinthe menaçant pour ceux qui ne savent pas les naviguer ; et il vient de te prouver qu'il est loin d'être un étranger dans les environs. Ça se voit dans son visage, de toute façon. Tu te surprends presque toi-même quand tu lui offres un sourire. « Took you long enough. » Un léger soupir traverse tes lèvres, alors que tu hausses légèrement les épaules. La pénombre du pub dépose un halo doré sur sa peau, et ses yeux semblent plus sombres que jamais. Ses cils, sous cet angle, sont interminables.

Dans ta poitrine, ton coeur bats si vite que tu en as presque le vertige. « Although I was hoping for a last night in peace before you drag me to wherever you want me to go. » Tu testes les eaux, y trempant les orteils. Tu as besoin de savoir qui il est, ce qu'il te veut. S'il te faudra fuir encore, ou si tu peux te détendre un petit peu. Si tu comptes m'enfermer quelque part, dis-le moi maintenant, Nader. Je ne supporterai pas une autre trahison.

# 06/09/21, 01:29 pm

Elle n'a pas l'air surprise de te voir là. Irritée, certes — mais pas étonnée. Ça te prouve qu'elle n'est pas aussi naïve que d'autres auraient pu le penser. Qu'elle a fui en sachant très bien que tu la retrouverais. C'était votre destin. Le tien, le sien. Elle ne pouvait y échapper, et sa résignation à te voir ainsi prendre place à ses côtés te souffle qu'elle commençait à l'accepter.

Tu ne baisses pas ta garde, pourtant. Tes yeux la scrutant sans broncher, malgré la fougue que tu lis dans son regard allumé. « Or maybe I just wanted to see if you would've eaten it before finding me again. » Elle te sourit, et tu ne sais quoi en penser. L'ombre d'un rictus passe sur tes traits, mais tu n'es pas assez à l'aise en sa présence pour le laisser s'installer. « I wasn't hungry. » Tu aurais eu le temps, au cours de la journée. Tu avais simplement choisi de mettre le fruit de côté. Elle l'avait mérité. « Took you long enough. » qu'elle ajoute avec un soupir. Et tu sens sa malice peu à peu lui échapper. Vois passer une ombre dans ses yeux. « I had places to be. » Tu ne penses pas au choix de tes mots. Répartie instinctive, mais sentie. Isn't that what you told me ?

Tu la sens anxieuse à tes côtés. Son corps est tendue, sa posture méfiante. Elle ne fait pas mine de s'enfuir, et tu doutes qu'elle causera une scène au beau milieu du bar. Mais son agitement est évident. « Although I was hoping for a last night in peace before you drag me to wherever you want me to go. » qu'elle te jette finalement. Et tu comprends. La peur d'être asservie, la peur de perdre sa liberté. Cette même crainte qui t'avait saisie lorsque vous vous étiez trouvés. À l'entendre mettre les mots dessus, tu sens ton estomac se retourner. Incertain d'avoir réellement balayé la peur des retombées de votre lien. Et si tu la rassurais, pour commencer ? « I don't have anywhere to drag you to. » Tu soupires. Croises tes mains sur le comptoir, le corps à une distance raisonnable du sien en dépit de la proximité de vos tabourets. « I'll give you peace if you want it. As long as you don't try to vanish for good. » Tu lui jettes un coup d'oeil entendu. Peu confiant de ses intentions, dans l'instant présent. Si elle redoutait d'être enfermée, asservie, le risque qu'elle disparaisse pour t'échapper était réel. Laisse pas ça arriver.

« So, that's it, then ? » Tu laisses tes yeux vagabonder sur les bouteilles derrière le comptoir. Imperméable au brouhaha ambiant, et aux quelques regards qui vous toisent. Le dos voûté pour ne pas avoir l'air trop grand — vaine tentative de te fondre dans le décor. « That's why you ran away ? » Tu comprends. La réticence au coeur, de ton côté également. Tu tenais à ta liberté. À tes mouvements. Et bien que tu aies refusé de l'admettre, ton absence de motivation à trouver ton âme soeur n'avait pas été étrangère à ton indépendance prononcée. Qui sait sur qui tu aurais pu tomber. Les peurs d'Adley étaient encore plus légitimes que les tiennes, néanmoins, et tu choisis de ne pas lui en tenir rigueur. « You thought I was gonna pull you out of your life and force you to live mine ? » Comme tant d'autres — mais ce ne serait pas le cas, pour vous. La vie de la gamine ne semblait pas bien différente de la tienne. Et au vu des quelques informations que tu avais grapillées, de l'aisance de tes contacts à l'identifier, ton instinct te soufflait que vos vies étaient encore plus proches que vous ne le pensiez. So don't worry, Adley.

I think it's safe to say that I'm not gonna take you away.
I don't have anything to offer you, anyway.

# 06/09/21, 01:29 pm

« I wasn't hungry. » Tu as de la difficulté à le croire, mais tu apprécies l'effort. A few white lies never hurt anyone. Si tu en étais à voler des fruits, ça devait bien être parce que tes poches étaient aussi vides que ton estomac, et il l'avait compris. Tu dois l'avouer, la perspective d'avoir la pomme à manger te plaît, même si elle était un peu cabossée à présent. Mais tu ne comptes tout de même pas baisser ta garde pour ce simple geste, qui pourrait être une manière comme une autre de t'acheter. For so little, it would be laughable. Tu te doutes que ce n'est pas le cas. Mais si tes années dans les rues t'ont appris une chose, c'est la méfiance. Ton sourire reste là, à peine assumé, mais tu es toujours prête à bondir sur tes pieds pour déguerpir. Tu aimerais croire en ses bonnes intentions, mais est-ce que tu peux vraiment te le permettre ? Est-ce que le monde ne t'avait appris à ne pas faire confiance à personne ? Tes trahisons, tes abandons, tout t'avait rappelé à chaque fois avec une douleur vivace que tu avais un coeur trop grand. Not anymore.Mais celui-là, Nader, il te déstabilise. « I had places to be. » La répartie parfaite, qui étire ton sourire quand tu ais à y penser. Tu as presque envie de l'apprécier. Tu te contentes de lui jeter un regard de biais, appréciant bien malgré toi la malice et la complicité qui s'était installée avec un peu trop de facilité. Is it really that, then ? Our souls, joined together.
Is that what it feels like to be whole ?

Autant en avoir le coeur net. Tu arraches le pansement, et tu lui tends l'opportunité sur un plateau d'argent. Are you here to take me away ? Tu caches la question sous une remarque au ton acerbe, mais la vulnérabilité et l'angoisse sont là, juste en-dessous. Tu ne veux pas courir, mais si tu le dois, tu le feras. À quelque part, tu espères qu'il va te rassurer ; mais ça aussi, ça t'effraie, sans que tu ne puisses te l'expliquer. « I don't have anywhere to drag you to. » Tu gardes les yeux baissés sur ton verre déjà trop vide. Ta gorge serrée, et ton coeur qui bats vite. « I'll give you peace if you want it. As long as you don't try to vanish for good. » Tes yeux se relèvent vers lui à la mention d'un mot en particulier. Peace ? Tu n'avais jamais vraiment connu la paix. C'était un mythe, pour une Ombre comme toi. Mais il semblait sincère. He's not going to take you away. Pas si tu acceptes de rester dans les environs, et de cesser de le fuir. Mener ta vie, avec lui jamais bien loin. Ça ne te déplaît pas ; mais ça ne t'arrange pas tellement non plus. Ça pourrait être bien pire. Bien, bien pire. Maybe he's not so bad after all.

« There's no peace for people like me. » Tu lui réponds, la voix basse, avec un peu de résignation. Mais ça reste doux, pas arrogant. Tu acceptes silencieusement les termes, au moins pour le moment. Il devra encore te prouver qu'il peut avoir ta confiance ; et vice versa, clairement. S'il a grandi dans les rues de Tivan comme toi, comme tu en doutes, vous vous ressemblez aussi sur ce point-là. « So, that's it, then ? That's why you ran away ? » Tu ne réponds pas. Il a déjà sa réponse. Tu ne fais que lever ton verre lentement, sirotant ta gorgée. Sa présence à tes côtés ne te dérange plus tellement. Ça t'apaise, on dirait. Le sol semble plus solide. Le monde, plus clair. « You thought I was gonna pull you out of your life and force you to live mine ? » Ton sourire est presque triste, alors que tu te tournes un peu pour mieux le regarder. Autour de vous, tout le monde continue de vivre ; personne ne vous porte la moindre attention. « Can you blame me ? »Tu fais de ton mieux pour tempérer la colère dans tes yeux. « Every day, I hear about Shadows being taken away, forced to change their lives, their identities. They're stripped of everything that they are. They just become... ghosts. » Tu gardes ta voix basse, restant tout de même prudente à qui pourrais t'entendre. Tu sais que c'est même risqué de lui en parler à lui ; qui sait d'où il sortait ? Mais c'est plus fort que toi. « I am not interested in a life where I can't speak for myself. » Tu hausses légèrement les épaules. « But from what I can see, you're not one of them. Unless you have very bad taste in clothing. » Les nobles, les hauts placés. Ceux qui t'auraient fait du mal sans même sourciller. « You grew up around here, didn't you ? » C'est une vraie question. Une curiosité, qui t'échappe sans la moindre hésitation. Tu le regardes franchement, tes cheveux en cascades autour de ton visage, à l'aise dans ton environnement. Maintenant que tu sais qu'il ne t'emmènera pas, tu peux t'autoriser à apprendre à le connaître un peu. Pas trop le choix. Tu ne baisses pas ta garde, et tu n'es pas totalement rassurée.
Mais si Nader doit devenir ton ennemi, autant savoir à qui tu as à faire.
Better the devil you know than the devil you don't.